Copywriting, le Palais des illusions

copywriter et redaction

Aujourd’hui, pour te parler de Copywriting, j’ai le plaisir de ré-ouvrir les portes de mes Tranches de Marketing à l’ami Bruno Gonzalvez : Un blogueur (entre autres) n’aimant pas le politiquement correct qui m’a fait la joie de me proposer un excellent article invité que je m’empresse de publier.

Pédagogique, concret et pratique, ce billet amènera le lecteur en quête de savoir que tu es surement à réfléchir sur des notions propres à l’écriture et à la perception en copywriting.

Il met précisément le doigt sur la difficulté relative que rencontre le Copywriter quand il tente de retranscrire les besoins du client tout au long de son argumentaire. Toute une question « d’angle » en somme. Quoiqu’il en soit, tu l’auras compris (ou pas) : je te recommande chaudement sa lecture!

Et surtout fais gaffe, tu risques d’apprendre des choses. Allez, place au billet et bonne lecture :

o

– Pfff, encore un qui n’a rien compris !

C’est sur ces mots un brin agacés que mon confrère et néanmoins ami Clément m’aborde à la sortie d’un immeuble cossu devant lequel je passe par hasard. Visiblement, l’entrevue qu’il vient d’avoir avec son client ne s’est pas très bien passée…

– Je ne comprends pas comment c’est possible, renchérit-il, à croire qu’il a lu mes textes de travers.

Il tire nerveusement sur sa cigarette sans se rendre compte qu’elle s’est éteinte. Tant mieux, je commençais à avoir mal à la tête.

Pour bien vous situer le contexte, il faut savoir que Clément est concepteur-rédacteur pour le web. Lui préfèrera vous dire qu’il est copywriter (il prononce « copiraï-teur »), mais c’est la même chose selon moi. Bref, il lui arrive régulièrement de se heurter à une certaine subjectivité de ses clients à l’égard de ses textes, sans jamais percevoir le fond du problème.

 

Et quand c’est le cas, il vient me voir, non pas pour avoir une réponse (je n’ai pas la prétention de croire que je suis un expert en la matière) mais plutôt pour avoir quelqu’un à qui parler, ou auprès de qui exprimer sa frustration. En général, je me contente d’écouter, avançant un embryon d’idée ici ou là, reflétant surtout sa propre pensée en la reformulant différemment, histoire de l’aider à faire le tri entre ce qu’il croit et ce qu’il sait. Mais cette fois, c’est différent, il semble réellement perturbé.

 – Au fond, finit-il par lâcher en regardant sa cigarette d’un air absent, je me demande si je suis vraiment fait pour ce job. Après tout, ce n’est pas la première fois que ça m’arrive. Et ce client m’a clairement indiqué qu’il envisageait de faire appel à quelqu’un d’autre si je ne trouvais pas le moyen de faire passer correctement son message. Franchement, je ne peux pas l’en blâmer…

Je l’invite à s’asseoir sur un banc. Pour une fois qu’il fait presque doux, ce serait dommage de ne pas en profiter. Et puis un peu d’air frais, ça fait du bien aux neurones. J’attaque doucement :

– En gros, ton client ne s’est pas retrouvé dans tes textes ?

– Carrément ! Il m’a ressorti quelques extraits de mes dernières productions en m’expliquant que ce qu’il y voyait allait à l’encontre des principes mêmes qu’il essayait de faire passer auprès de ses partenaires. Et ça, tu t’en doutes, il préfèrerait éviter.

– Et son interprétation était pertinente ?

– C’est bien ça, le pire. En me plaçant de son point de vue, c’est vrai que certains de mes textes pouvaient être compris d’une tout autre façon que ce que j’avais voulu exprimer. C’est grave.

– Je vois, tu as surement été victime de l’effet que j’appelle « le palais des illusions ».

Il me lance un regard en biais.

 – Allons bon, qu’est-ce que tu vas encore me sortir comme théorie.

– Ce n’est pas une théorie, au contraire, c’est même plutôt empirique comme principe. Disons que c’est le fruit d’une certaine expérience. La mienne mais aussi celle d’autres personnes qui ont déjà vécu ce que tu me décris.

– Ah donc tu aurais une solution ? Ça m’intéresse !

– Une solution, je ne sais pas. Mais une piste de réflexion, peut-être.

 

Le copywriting, une question « d’angle »?

Le soleil fait brusquement une apparition en trouant le plafond nuageux pour projeter une lumière crue qui découpe nos silhouettes sur le sol. Je lui montre nos ombres respectives.

– Tu ne trouve pas génial de pouvoir ainsi toucher du bout des doigts la cime de ce grand arbre, là ?

J’agite ma main afin que son ombre se mélange avec celle des plus hautes branches d’un érable planté quelques dizaines de mètres derrière nous.

Il me jette de nouveau son regard mi-amusé mi-réprobateur.

– À quoi tu joues ? Tu vois bien que c’est juste une illusion d’optique.

– Justement, tu le sais et moi aussi. Mais tu reconnais aussi que l’effet obtenu montre bien un contact apparent entre ma main et l’arbre, n’est-ce pas ? Même si l’image formée par ces deux ombres se contente de refléter une réalité bien plus complexe. Et même totalement différente.

Je le sens hésitant.

– Où veux-tu en venir ?

– C’est simple. Ton client souhaite que tu l’aides à exprimer une réalité qu’il connaît sur le bout des doigts – c’est son métier – et il te confie donc le soin d’en produire une image simplifiée, mais cohérente, qui sera projetée aux yeux de ses propres contacts. Ta contribution revient alors à faire la lumière sur certains aspects de son activité grâce à tes textes qui en délimiteront une « silhouette » aussi précise que possible.

– Je commence à comprendre…

– Mais, tu l’as vu, il arrive parfois que ces jeux d’ombres puissent être interprétés de différentes manières, généralement en raison de l’éclairage apporté aux informations, mais aussi à cause d’un manque de netteté ou même encore d’une mise en perspective inadaptée. Bref, c’est ce que j’appelle le « palais des illusions » parce qu’on peut ainsi construire tout un argumentaire rédactionnel avec un soin du détail, de la précision et de la qualité digne d’un bâtisseur de palais… pour constater qu’au final notre édifice pourrait tout aussi bien être confondu avec une gare, un fort romain ou une école maternelle.

– Ah ben finalement, non. je ne comprends plus. Ça ne m’aide pas trop, ton image là…

– Prenons un autre exemple. Imagine un test qui consisterait à montrer deux silhouettes très simples à un nombre quelconque d’individus auxquels tu demanderas ensuite de t’indiquer l’objet qu’ils ont vu. Prends alors un cylindre que tu éclaires selon deux angles bien distincts : d’abord de face (la section ronde du cylindre) puis de profil (le côté du cylindre). Suivant l’ombre obtenue, les observateurs te diront alors avoir vu en premier une boule (ou une balle, un ballon, une orange ou n’importe quel autre objet sphérique), puis un objet « rectangulaire » (une planche, une brique, bref n’importe quoi de parallélépipédique). Finalement, aucun ne pensera avoir vu en réalité le même objet, et encore moins que cet objet ait pu être un cylindre.

La raison de cette erreur ? Tout simplement leur capacité d’interprétation qui aura été mise à l’épreuve par ta façon (volontaire, pour le coup) d’éclairer le sujet.

 

illusion et interprétation en copywriting

Et toi, tu choisis quoi comme angle d’interprétation pour cette illustration dis moi: 9 dauphins ou autre chose? Vicieux va 😉

 

Clément garde le silence quelques instants puis semble sortir de ses pensées.

– Donc, si je comprends bien, tout est question d’éclairage… Je dois avant tout penser au résultat visible, et pas à l’objet initial dont je dois parler… Il me faut travailler en priorité sur l’impression que je veux faire passer…

– Oui, et dans ton cas, ça revient à traduire précisément les attentes du client. Et par conséquent à aborder avec lui la question de l’angle avec lequel il veut que tu traites tes textes, principalement en fonction de ce qu’il aimerait induire comme sentiment chez ses lecteurs. Tout n’est pas dans l’information, vois-tu, dans le factuel ou le raisonné. Une grande partie de la perception va s’opérer au niveau du non-dit (ou du non-écrit en l’occurrence) c’est-à-dire la manière dont les gens vont pouvoir interpréter ce qu’ils vont lire. Et si tu ne veux pas avoir de mauvaises surprises, autant t’appliquer à orienter toi-même cette interprétation.

– Le fameux éclairage de face ou de profil de mon cylindre.

– Oui, si tu veux, mais rien ne t’empêche de trouver un autre angle qui te permettrait de le présenter tel qu’il est réellement, quitte à le faire bouger un peu au cours de ta présentation (c’est-à-dire au cours du développement de ton argumentaire) afin de bien montrer qu’il s’agit d’un cylindre. D’ailleurs, c’est justement ce genre d’approche évolutive, un peu comme une intrigue qui se dénoue progressivement, qui va donner du corps à tes textes, les rendre plus vivants, et amener peu-à-peu les lecteurs à appréhender toutes les facettes du sujet, au lieu de les laisser se contenter d’une simple vue statique, souvent trompeuse.

Clément se frappe alors violemment la cuisse du plat de la main.

– Mais oui, c’est ça ! fait-il en se levant du banc presque brutalement.

Je file refaire mes textes et je j’appelle mon client pour les lui montrer dès demain. Merci, tu m’as bien aidé.

Je n’ai pas le temps de lui dire que je n’ai pas fait grand chose, sinon lui montrer moi aussi les choses sous un autre angle, qu’il est déjà parti, secouant la tête d’un air décidé. Puis, tout-à-coup il s’arrête, se retourne et me lance rigolard en se tenant les oreilles :

– Ah oui, au fait, ne t’inquiète pas pour les bois, ça te va bien !

Avant de repartir aussi vite, me laissant quelque peu interloqué, partagé entre la surprise et l’incompréhension. Et puis je regarde le sol, ne pouvant alors m’empêcher de sourire. Pendant qu’on discutait, l’ombre de l’épicéa derrière moi s’est naturellement déplacée, au point de finalement se confondre presque totalement avec la mienne.

Presque seulement, car deux branches parmi les plus hautes semblent désormais sortir de chaque côté de ma tête, formant comme deux superbes bois de cerf du plus bel effet. C’est clair, voila un bien beau trophée à accrocher au mur de mon propre palais des illusions…

 

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10 commentaires pour “Copywriting, le Palais des illusions”

  1. Merci Sylvain d’avoir osé publier cette petite « histoire de cas », malgré son côté un peu moins humoristique que ce que tu as l’habitude de présenter à ton auguste assemblée.

    De mon côté, j’ai eu beau me forcer, impossible de voir des dauphins… 🙂

    Bruno

    • Sylvain dit :

      Tout le plaisir est pour moi l’@mi 😉
      Merci pour cet article plein d’instructages et farpaitement amené.

      T’as pas vu les dauphins? Ca m’étonne ça tiens. 😀 😉

  2. LaurentB dit :

    En fait, je suis d’accord, mais ça dépend… 😀
    Par expérience également, dans la plupart des cas que je rencontre, le client connait effectivement son métier par coeur, etc. Sauf qu’il a perdu le fil de ses « valeurs » et surtout comment être remarquable.
    Notre rôle doit être de lui enlever la loupe et sa tête du guidon, pour lui faire prendre une vue depuis un téléscope.

    Sinon, c’est clair que sans une approche en symbiose, on se retrouve dans une situation très compliquée pour un prestataire qui n’est absolument pas en phase avec la demande.

    En tout cas, belle histoire. Je risque d’emprunter l’analogie car elle est très efficace.

    • En effet, il faut aussi bien souvent donner au client les clés de sa propre communication et lui dire ce qu’il faut que les gens retiennent de son message. C’est l’un des paradoxes de cette activité.

      En attendant, merci de ton appréciation. Et tu peux évidemment reprendre l’analogie en question ; ça me plairait de la voir se balader dans d’autres argumentaires que le mien.

      Amitiés

  3. Aurelien dit :

    Une bien belle histoire

  4. Yann dit :

    C’est également toute la difficulté de l’exercice : raconter une histoire avec un angle capable de varier d’une problématique à l’autre. Vu qu’il est question, pour un copywriter, de vendre une histoire, il est assez commun de trouver la même approche d’un sujet à l’autre. Comme sur TdM, l’humour par exemple est la marque de fabrique des articles publiés.

    Si on ajoute à ce filtre une incompréhension totale ou partielle des éléments que souhaite transmettre le client, on va souvent dans le mur.

    Merci pour la réflexion !

  5. Sylvain dit :

    Bonjour à tous,

    En plus de tout ça, je dirais que le plus dur dans le métier de Copywriter ça doit être de se retrouver face à un client qui veut te faire partir sur un angle d’attaque dont tu sais pertinemment qu’il est nul ou inadapté alors que lui a l’intime conviction que c’est la seule stratégie à adopter.

    En sachant également que tu auras la responsabilité en cas d’échec (très probable).

    Cordialisme Copywrité,
    Sylvain

    • Samuel dit :

      Ca n’est pas réservé aux copywriterz malheureusement, c’est souvent le lot des prestataires, dans le web comme ailleurs.

      Après, tant que les éléments qu’on ne maîtrise pas n’influent pas sur la rémunération c’est pas grave. Quand on pense que le client va se planter sur un choix on le lui dit, avec tact et diplomatie, et en argumentant. Ensuite la balle est dans son camp: s’il est ouvert à la discussion et prêt à revoir son point de vue tant mieux, sinon tant pis pour lui. On l’a prévenu et au final c’est son argent. Mais c’est sûr que c’est jamais agréable ni bon pour de futures collaborations (encore que, beaucoup de gens vont se plaindre en public, mais reconnaître entre 4 yeux qu’on les avait avertis, et s’en souvenir par la suite).

      Amabilitudes Kaféinées,

      Samuel

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